Le Canada de Stephen Harper : leader environnemental ou puissance pétrolière ?

Leona Aglukkaq, ministre fédérale de l'environnement

Leona Aglukkaq, ministre fédérale de l’environnement

Le 27 septembre dernier, en réaction à la publication du rapport du GIEC sur les changements climatiques, Leona Aglukkaq, ministre fédérale de l’Environnement, a soutenu que le Canada jouait un rôle de leader en matière de lutte aux changements climatiques.
S’agit-il d’une blague ?  Ou bien Mme Aglukkaq, Stephen Harper et les conservateurs évoluent-ils dans un univers parallèle ?

Afin de mieux saisir la portée de l’engagement des conservateurs dans leur lutte contre les changements climatiques, je suggère la lecture du mémoire que leur chapitre provincial vient de soumettre à la Commission sur les enjeux énergétiques du Québec, qui tient ses audiences jusqu’au 11 octobre prochain.

On y apprend que les conservateurs, qui déclarent d’entrée de jeu favoriser l’économie de marché, font preuve d’un net biais pour les énergies fossiles.

Ainsi, à leurs yeux, les surplus d’électricité dont dispose actuellement le Québec constitue non pas une formidable opportunité mais plutôt un problème, qui ne fera que s’aggraver avec le développement de nouvelles centrales et de parcs éoliens.  Si nous avons des surplus, c’est que nous n’écoutons pas le marché, qui dicte les prix et, par le fait même, le comportement que les états devraient idéalement adopter.  Si nous écoutions le marché, plaident ses sirènes conservatrices, nous ne nous en porterions que mieux, économiquement du moins (les autres aspects, dont l’environnement, semblent peu ou pas retenir leur attention).  Donc, suspendons les travaux d’aménagement de la Romaine et annulons les appels d’offres pour la construction de 800 MW de nouvelles éoliennes.

Poursuivant dans leur logique, les conservateurs nous enjoignent de réduire nos objectifs d’électrification des transports.  Un programme d’incitatifs coûterait cher au gouvernement et de plus, argument imparable, une migration vers des véhicules électriques priverait l’état des revenus de la taxe sur l’essence.

Face à toutes ces extravagances d’énergies et de véhicules plus propres, les conservateurs brandissent des valeurs sûres : le pétrole et le gaz naturel.  Afin d’assurer notre sécurité et notre prospérité, il faut  « prendre les mesures nécessaires pour diversifier nos sources d’approvisionnement » de ces deux combustibles.  Cela tombe bien, il y a justement dans les cartons un projet de pipeline pour amener l’or noir albertain jusqu’à Montréal (et peut-être jusqu’aux raffineries du nord-est américain…).  Nous devons également « permettre à l’entreprise privée d’exploiter les gisements québécois de pétrole et de gaz naturel, si cela est commercialement réalisable et sécuritaire ».   En somme, hors des énergies fossiles, point de salut.

Ce mémoire, de même que les propos de la ministre de l’environnement et de ses aussi tristes prédécesseurs, le retrait du protocole de Kyoto, nombre de gestes et l’attitude générale du gouvernement conservateur face aux changements climatiques sont autant de preuves du peu d’importance accordée à ceux-ci, au moment où ils se font de plus en plus inquiétants.  La gravité de la situation exige de nos élus d’agir dès maintenant, en s’engageant fermement à lutter contre cette menace à la pérennité de nos sociétés ; malheureusement, à ce chapitre, nous ne pouvons visiblement pas nous attendre à grand-chose de la part de l’actuel gouvernement fédéral, dont la priorité avouée demeure le développement de l’industrie pétrolière.