Atmosphère chaude, volonté tiède

noaa-climatSelon la National Oceanic and Atmospheric Administration, le mois de juin 2016 a été le plus chaud sur la planète depuis le début des relevés de températures en 1880. Il s’agissait du quatorzième mois consécutif où un record de chaleur avait été battu, une tendance qui doit nous inquiéter. En effet, la température moyenne de l’atmosphère terrestre a augmenté de 0,9° C et déjà les effets s’en font sentir : sécheresses, inondations, événements météorologiques extrêmes, érosion des littoraux…  C’est avec raison que les scientifiques nous exhortent à agir sans tarder pour limiter les changements climatiques, en réduisant pour ce faire nos émissions de gaz à effet de serre. Si nous n’entreprenons pas dès maintenant les changements nécessaires, le réchauffement pourrait atteindre 3 et même 4° C avant la fin du présent siècle, ce qui entraînerait des conséquences carrément désastreuses. À terme, c’est la pérennité de nos sociétés humaines qui est en jeu.

Malheureusement, les gestes de nos élus ne démontrent pas une volonté d’amorcer ces changements. Nous pouvons donner en exemple la réunion en juillet dernier des premiers ministres canadiens, qui ont discuté de la collaboration des provinces et des territoires concernant la Stratégie canadienne de l’énergie. S’ils ont insisté sur l’importance de la transition vers des sources d’énergie plus propres et renouvelables afin d’assurer la résilience économique à long terme et la sécurité énergétique, ils accordent encore une large part à l’exploitation et au transport des hydrocarbures. Comme on peut le lire dans le communiqué officiel :

Les premiers ministres reconnaissent que les industries pétrolière et gazière sont importantes pour le Canada et qu’elles continueront de contribuer de manière importante aux moyens de subsistance de familles et de communautés partout au Canada, alors que nous nous dirigeons vers une économie plus sobre en carbone.

Les premiers ministres ont aussi réitéré leur engagement à travailler avec le gouvernement fédéral pour acheminer les ressources énergétiques canadiennes aux marchés domestiques et internationaux, ce qui constitue un élément essentiel pour soutenir la création d’emplois à long terme et la croissance économique, et ce, tout en consolidant un meilleur accès à l’énergie.

Il apparaît ainsi peu probable de les voir stopper des projets d’oléoduc comme Énergie Est ou entraver l’exploitation des sables bitumineux.

Un second indice nous est fourni par le projet de loi 106, dont plusieurs articles concernent les hydrocarbures et que le gouvernement libéral du Québec semble vouloir faire passer en catimini, tenant une commission parlementaire en plein mois d’août. On entendra alors 29 groupes, dont plus des 2/3 sont ouvertement en faveur de l’exploitation du pétrole et du gaz. Ce projet n’a rien de rassurant pour ceux qui croient que nous devons nous affranchir des énergies fossiles. Tout d’abord parce qu’il donne d’importants droits aux détenteurs de licences d’exploration, de production et de stockage d’hydrocarbures, droits qui auront préséance sur ceux des citoyens et des municipalités. Ensuite, de nombreux articles stipulent que le gouvernement fixera par règlement les conditions; on laisse donc des blancs que le conseil des ministres pourra éventuellement remplir afin d’accommoder les prospecteurs et exploiteurs.

Comme souvent au cours des dernières années, ces deux exemples démontrent que les politiciens livrent un double discours. D’une part, ils semblent remplis de bonnes intentions lorsqu’ils disent vouloir s’attaquer aux changements climatiques, faisant profession de foi verte et fixant des objectifs qu’ils voudraient ambitieux. D’autre part, ils continuent de soutenir les hydrocarbures, se cantonnant dans un rassurant business as usual. Aucun, pour l’instant, n’a le courage de remettre en question notre actuel modèle économique fondé sur l’énergie facile que nous procurent depuis plus d’un siècle les combustibles fossiles.  Oui, le pétrole et le gaz ont été au cours des dernières décennies une source de prospérité pour l’Ouest Canadien. Oui, ils ont permis aux sociétés développées d’atteindre une richesse et un confort matériels inégalés dans l’histoire de l’humanité. Et oui aussi, le passage à un monde beaucoup plus sobre en hydrocarbures ne sera pas nécessairement facile, il exigera des changements à nos habitudes et dans bien des cas des efforts, mais, et c’est ce que nous devons tous réaliser, il est inévitable.

La peur est une réaction, le courage est une décision, disait Churchill.  Face à la menace des changements climatiques, citoyens et élus doivent aujourd’hui choisir d’agir avec fermeté.  Faut-il le rappeler, il nous reste que très peu de temps pour entreprendre la nécessaire transition énergétique.

Crédit photo : NOAA

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