En août dernier, une voisine de la rue Albert a renoué avec une longue tradition villageoise : vendre à l’encan une foule de choses très diverses accumulées au fil des ans.
Les circonstances varient : casser maison, démanteler une ferme, vendre des animaux, déménager… Mais le rituel est le même : on se rassemble, d’un peu partout, voisinage, parenté ou parfaits étrangers, pour miser sur des objets convoités ou inattendus ou simplement pour assister au spectacle de l’encanteur et de son équipe.
Dans une époque où chacun reste chez soi, occupé à communiquer avec le vaste monde à travers ses écrans de télé, d’ordinateur, de portable ou de cellulaire, il fait bon voir tous ces gens arriver peu à peu, se stationner en longues files, dont plusieurs avec les remorques nécessaires pour leurs achats éventuels, et se rassembler en plein air avec leurs chaises pliantes. On retrouve des connaissances, on fait le tour des lots à vendre, on échange des nouvelles et on attend le début de l’encan.
Façon ancestrale de se regrouper, de vivre ensemble un rituel, de faire circuler des biens en leur donnant une «seconde vie» ou, tout simplement, de profiter de l’occasion de «faire une bonne affaire». Sans parler du spectacle qu’offrent généreusement les encanteurs…
Une autre façon de faire du «nous», de rassembler autour d’un projet ou d’une activité, de créer des liens et de souder une communauté.
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Les encans de villages n’existent pas en ville, où ils sont remplacés par les encans chics d’œuvres d’art ou d’antiquités : autre public et fonction bien différente!
Mais un autre rituel collectif revient régulièrement, en ville comme en campagne, et qui consiste, tous les quatre ans, à «miser son vote» sur le candidat ou le parti de son choix. Un encan qu’on appelle élection.
On vient tout juste d’en vivre un, où les résultats ont sérieusement «rebrassé les cartes». Et quels que soient nos préférences ou nos choix personnels, qu’on ait «gagné ou perdu nos élections», il y a un certain nombre de leçons qu’on peut en tirer.
D’abord que plus de 30% des citoyens ne jugent même pas utile de participer à cet exercice de choix collectif : difficile de s’entendre sur quoi que ce soit quand 3 citoyens sur 10 ne veulent même pas «jouer le jeu». Le décrochage électoral des jeunes, particulièrement alarmant depuis 1994, a cependant peut-être été moins important cette année (les chiffres ne sont pas encore disponibles).
Ensuite, que le niveau de notre «éducation électorale ou démocratique» est encore assez faible et mériterait d’être beaucoup mieux outillé, dès le niveau scolaire : quand on sait que plusieurs électeurs qui «voulaient du changement» hésitaient entre la Coalition avenir Québec et Québec solidaire, c’est le signe qu’on vote souvent sans connaître les intentions de ceux pour qui on vote; car la seule ressemblance entre les deux est qu’ils n’ont jamais gouverné; mais ils sont aux deux opposés comme programme politique.
Ensuite, que les électeurs, un peu partout dans le monde, sont écoeurés des «vieux partis ou politiciens» et qu’ils sont souvent prêts à voter pour n’importe qui, pourvu qu’ils soient nouveaux (voir Macron en France, Trump aux États-Unis, Bolsonaro au Brésil, le Brexit en Angleterre, etc.).
Et enfin, que même si notre candidat ou notre parti n’a pas gagné le 1er octobre, si nous croyons vraiment à l’importance du programme ou des idées pour lesquelles nous avons voté (sur les questions d’environnement, par exemple), il nous appartient, à chacun de nous, de continuer à travailler pour faire avancer ces idées et ces projets au cours des quatre prochaines années.
(Texte de ma chronique «Ce que j’en pense…» publiée dans le numéro d’Octobre 2018 de L’Événement de Scotstown-Hampden)