Voilà! Un mois après être entré sur Facebook, j’en sors définitivement. Mes amis avaient raison: l’outil n’est vraiment pas fait pour moi!
La réflexion qui suit vaut pour moi. Mais peut-être a-t-elle aussi quelque chose d’utile pour d’autres, qui sait?
Facebook est un outil de communications et de rencontres, un «réseau social». Soit! Il peut, pour certains, remplacer ce réseau qu’ils n’ont pas (ou peu). Pour les autres, qui ont déjà plein de réseaux, de communications et de rencontres, Facebook ne peut que s’ajouter… ou faire concurrence à ce qui existe déjà. Car peu importe les outils, personne n’a encore plus de 24 heures dans une journée; et pour plusieurs, ces 24 heures étaient déjà pleines avant l’arrivée de l’informatique et des réseaux sociaux! Alors…
Je voulais utiliser Facebook pour donner une plus grande diffusion à mes idées, mes invitations, mes suggestions: une façon de multiplier les bouteilles que je jette à la mer par le biais de mes quelques livres, mais surtout par mes articles dans des revues, mes blogues et mon site internet. Pour cela, j’avais intérêt à avoir le plus d’«amis» possible et, idéalement, des «amis» qui ont eux-mêmes beaucoup d’«amis», qui ont des réseaux, qui diffusent eux-mêmes. Du moins, c’est ce que j’ai cru comprendre…
Mais plus on a d’amis, plus on reçoit de choses venant de ces amis (et de leurs amis). Et quand ces amis nous ressemblent, ce qu’ils envoient est souvent susceptible de nous intéresser (que nos intérêts portent sur les nouvelles et les photos de famille, sur les vidéos de chats ou sur la politique internationale). Et donc plus on a de choses intéressantes à lire, à écouter ou à regarder (sans compter toutes les autres choses intéressantes auxquelles les premières nous renvoient par la magie du furetage/surfing propre à l’internet).
Comme ma vie était déjà «plus que pleine» avant mon entrée sur Facebook, j’en avais rapidement conclu que la seule façon viable pour moi d’utiliser cet outil était de diffuser mes propres messages (dans le but de multiplier mes bouteilles à la mer) mais de ne RIEN lire de tout ce qui m’était envoyé sur mon «fil» (sauf peut-être les messages personnels). RIEN voulant dire ici RIEN DU TOUT (comme pour un ex-alcoolique face à l’alcool).
Après un mois d’essai, je dois m’avouer vaincu. Impossible, pour moi du moins (mais sans doute aussi pour tout le monde), de m’en tenir à cette discipline. Non seulement j’ai commencé à lire l’un ou l’autre des excellentes choses qui m’étaient partagées par ces amis qui se multipliaient aussi, mais j’en ai lu de plus en plus (et encore, ce n’était qu’une INFIME FRACTION de tout ce qui passait sur mon «fil»). Et, pire encore, j’ai pris l’habitude de retourner de plus en plus souvent sur ma page («juste pour un rapide coup d’oeil» qui finissait toujours par être un oeil de plus en plus long) car les nouveaux messages s’ajoutaient souvent plus rapidement que je n’étais capable de les suivre!
Bref, le caractère addictif (la dépendance) de Facebook (comme de l’ordinateur et de l’informatique en général) a fait ses preuves encore une fois. L’outil est assez rapidement devenu un maître (de mon temps et de son usage) plutôt qu’un serviteur docile au service des objectifs que je poursuivais.
Nous ne dés-inventerons pas l’ordinateur, ni Facebook, ni les «réseaux sociaux» qui poussent comme des champignons (il y avait hier à la télé un reportage sur la popularité grandissante de Snapchat et autres concurrents, avec des jeunes qui expliquaient que pour eux, ce n’était pas une «perte de temps» mais simplement une autre façon d’utiliser son temps).
Peu importe ce que chacun d’entre nous en pense et l’usage concret qu’il en fait, il est indiscutable que cette technologie informatique (et ses innombrables applications) est en train de changer le monde très concrètement. La technologie n’est jamais «neutre» comme l’avait bien montré Marshall McLuhan. Elle a toujours des effets inhérents, induits par la technologie elle-même, peu importe les intentions ou les choix des individus qui l’utilisent.
Ces effets inévitables (sur le cerveau lui-même, mais aussi sur les rapports des individus au réel, sur leurs relations avec leurs semblables, et sans doute même sur les valeurs) seront-ils pour le mieux? Pour le pire? Pour un mélange des deux? Le débat est ouvert.
Chose sûre, c’est que malgré les avantages indiscutables que l’informatique apporte, je demeure personnellement très critique face à l’impact d’ensemble de cette révolution technologique. Et que je continuerais à signer, encore aujourd’hui, les articles du dossier que le Réseau québécois pour la simplicité volontaire (RQSV) avait produit dans son Bulletin Simpli-Cité il y a 5 ans: (vol. 12, nos 2-3, Été-automne 2011).
Alors, à mes «amis» Facebook je donne rendez-vous sur une autre plate-forme: mon site internet (où vous trouverez mes autres coordonnées pour pouvoir me rejoindre par courriel ou par le bon vieux téléphone —même pas cellulaire!). Au revoir donc…
Avec un grand merci à Sylvie (et à quelques autres) qui ont bien voulu m’initier patiemment à cet outil dans lequel j’allais effectivement me noyer…
Scotstown, le 4 août 2016
AJOUT DU 15 AOÛT 2016
Je viens de mettre un «second avis de départ» sur ma page Facebook. Cet avis a été l’occasion de poursuivre la réflexion amorcée le 4 août dernier. J’en reproduis donc le texte ici:
Deuxième avis, pour ceux et celles qui auraient manqué le premier dans l’abondance de tout ce qui passe sur votre fil (s’il est comme le mien!)…C’EST LA FIN! Je ne serai plus sur Facebook (voir les raisons ici: http://co22.org/dominiqueboisvert/wp/cest-la-fin/).Il passe sur mon fil des tonnes de choses vraiment intéressantes (dont plusieurs pourraient en plus m’être utiles). Mais cela a deux défauts MAJEURS (pour moi) qui font que les inconvénients sont plus importants (pour moi toujours) que les avantages:
- ces choses sont très diversifiées et contribuent, inévitablement, à DISPERSER MON ATTENTION ET MES INTÉRÊTS (surtout pour quelqu’un d’aussi curieux et éclectique que moi) et donc À ME DISTRAIRE ET À M’ÉLOIGNER DE MES PRIORITÉS;
la quantité de choses intéressantes qui défilent sur ma page Facebook est tout simplement IMPOSSIBLE À SUIVRE. Je n’ai toujours que 24 heures dans mes journées (et avec le vieillissement, le nombre d’heures d’attention possibles a tendance à diminuer), et ces 24 heures étaient DÉJÀ PLUS QUE PLEINES avant mon arrivée sur Facebook. L’implosion était donc inévitable!Cette dynamique n’est d’ailleurs pas propre à Facebook, ni même aux seuls réseaux sociaux. C’est une caractéristique propre au nouvel univers rendu possible par l’informatique et ses innombrables déclinaisons (applications, outils, gadgets, etc. et leurs incessantes améliorations ou «nouvelles versions»).Ce à quoi nous avons désormais accès ne cesse d’augmenter, et à la vitesse Grand V d’ailleurs, alors que l’être humain qui est désormais confronté à cet univers en croissance exponentielle ne change pas vraiment. Ses journées et sa durée de vie terrestre restent en gros limitées. Alors qu’il est désormais sollicité, de plus en plus et d’une manière quasi impérative (dans nos pays riches en particulier, même si la dynamique reste foncièrement la même partout sur la planète), par infiniment plus qu’il ne pourra jamais satisfaire. D’où une pression, un stress, une frustration appeler à croître… à moins de se donner les moyens de sortir de cette dynamique infernale.Les moyens de ne pas (trop) se laisser écraser par cette dynamique vont varier avec les individus. Et ils ne passent pas obligatoirement par le retrait de ces outils informatiques. Mais quels qu’ils soient, ils ne peuvent éviter LA CONDITION INCONTOURNABLE à laquelle nous sommes tous et toutes confrontés: ACCEPTER DE RENONCER, DE CHOISIR, DE SE LIMITER parmi les innombrables possibles.Voilà! Je souhaite bonne route à tous ceux et celles qui poursuivent… Et je remercie tous ceux et celles qui m’ont aidé et m’ont alimenter au cours de cette brève (et heureuse) expérience de Facebook.Dominique BoisvertScotstown, le 15 août 2016
Permalien
BRAVO! cher monsieur,
Je viens de lire « C’est la fin! »… Excellente réflexion, qui alimente goulûment mon propre questionnement…
J’ai aussi lu, ce matin, dans Le Soleil du jour, votre article sur les changements climatiques… Rien de trop radical en effet! Vous exprimez mieux que je n’aurais su le faire mon point de vue sur le sujet.
Et oui, ajoutez-moi à votre liste de diffusion; je veux vous lire plus régulièrement!
Carol Amiot (encore sur FaceBook… de temps en temps!)
Québec
Permalien
Pour les raisons que tu donnes si bien, Dominique, je me suis interdit d’être ami-facebook. Tu m’en re-convaincs! Je te lirai de temps en temps sur ton blogue. Maurice…en train vers Québec…